Critique de la transmission • Dialogue entre Mohamed Mbougar Sarr et Laurent Vannini

Événement inaugural de la semaine de l'interculturalité 2022

Critique de la transmission – troisième saison

Dialogue entre Mohamed Mbougar Sarr et Laurent Vannini et discussion ouverte avec la salle

Les ouvrages de Mbougar Sarr ont pour particularité de tous s'interroger sur la transmission : historique, familiale, politique, individuelle et de faire de la catastrophe, ce moment à partir duquel plus rien ne peut plus être comme avant, le lieu de l'interrogation de la transmission. Lors d'un atelier organisé à l'EHESS en 2015/2016 par des doctorants sur le thème de la critique de la transmission, peu de temps après la parution de Terre Ceinte, son premier roman, l'auteur envisageait un travail autour de la transmission dans la littérature post-indépendance, et évoquait une poétique de la blessure dans le roman africain francophone (La Plaie de Malik Fall, Le Devoir de violence de Yambo Ouloguem, Les Soleils des Indépendances de Ahmadou Kourouma, Le Jeune Homme de sable de Williams Sassine) tout en préparant son second roman consacré aux blessures pluri-temporelles de l'exil, Silence du chœur. De purs hommes, l'année suivante, prendra appui sur l'exhumation d'un corps d'homosexuel au Sénégal pour traiter la part de l'oubli d'une société et de ses membres dans leur homophobie au présent. La Plus Secrète Mémoire des hommes est un fil tendu entre époques, territoires, formes de pensées et sur lequel l'auteur nous invite à déambuler, à funambuler, faisant de nous des voyeurs et des témoins d'une catastrophe passée, et les acteurs de ses conséquences au présent. Devenu écrivain de la littérature monde, à laquelle il aspire, et traducteur au sein d'une équipe de quatre personnes de son dernier roman, prix Goncourt, quelle continuité voit-il entre littérature post-coloniale des années 60 et 70 et littérature monde au présent ? Quel rôle joue la traduction dans la transmission dans l'écart entre ces deux mondes ? Ce sont quelques-unes seulement des questions que lui posera Laurent Vannini à l’occasion de cette rencontre.

Mohamed Mbougar Sarr est un romancier et essayiste sénégalais, lauréat du prix Goncourt 2021 pour La Plus Secrète Mémoire des hommes. Fils d'un père médecin et d'une mère femme au foyer, aîné de six frères, il fait ses études secondaires à Saint-Louis, puis ses classes préparatoires à Compiègne. Ses recherches de Master à l'École des hautes études en sciences sociales portent sur la notion d'émotion dans la pensée de Léopold Sédar Senghor. Il entame ensuite une thèse sur ce qu'il nomme une poétique de la blessure dans le roman africain post-colonial francophone entre 1960 et 1970. Son premier roman, Terre Ceinte (2015), reçut entre autres le prix Ahmadou-Kourouma au salon du livre de Genève. Son second roman, Silence du chœur — portrait du quotidien de migrants africains en Sicile — obtint le prix Littérature Monde du festival Étonnants voyageurs de Saint-Malo. En 2018, il publie son troisième roman, De purs hommes, inspiré d'un fait divers homophobe. Trois ans plus tard, son roman La Plus Secrète Mémoire des hommes, inspiré du destin de l’écrivain malien Yambo Ouologuem et de son livre Le Devoir de violence, lui vaudra le prix Goncourt. L'exil, les blessures infligés aux corps et aux esprits, l'injustice et la violence historique et politique, sont des thèmes traversant chacun de ses ouvrages.

Laurent Vannini traduit de l’anglais au français dans les domaines des sciences humaines et sociales et depuis 2018 en littérature. Il a notamment traduit From Counterculture to Cyberculture de Fred Turner, qui est aujourd’hui un ouvrage sociologico-historique de référence concernant le rôle joué par le mouvement néo-communaliste états-unien dans l’avènement de l’ordinateur comme outil d’émancipation individuelle, ou bien plus récemment l’ouvrage majeur de philosophie de Valentin Yves Mudimbe, L’Invention de l’Afrique, sorti en mai 2021 qui donne à voir le cadre scientifique de la pensée coloniale de l’Afrique en Europe.